Personnification des sociétés
Il y a longtemps j'ai parlé des noms de voitures auxquels on retranchait l'article, disant "Citroën C3" au lieu de "la Citroën C3" (voir ici). Cette façon de faire est toujours pratiquée, mais dans le même ordre d'idées j'ai remarqué entretemps que l'on faisait de même avec les noms de sociétés.
"Avec Pages jaunes, la solution est autour de vous." (pub vue en avril 2012)
"SNCF vous remercie de votre attention." "SNCF vous souhaite un agréable voyage." (annonces gare de Lyon le 29/03/2012)
"Pour être informé à distance sur Transilien (...)" (pub dans le train, novembre 2012)
J'ai même entendu des journalistes radio pratiquer avec déférence cette suppression de l'article en évoquant "SERNAM", la fameuse société de transports, dans leur bulletin d'information. (infos France culture le 27/03/2012) Et tout récemment, j'étais à la salle Pleyel à Paris, où un écriteau nous apprend que cette valeureuse institution est soutenue par le Ministère de la culture, et que "Société Générale est son mécène."
Une société, que je sache, est une chose, pas une personne. Elle doit donc porter un nom commun : il y a la Société Générale, la Société Nationale des Chemins de fer Français, le SERvice NAtional de Messagerie, etc. Idem pour les Pages jaunes et le Transilien. Seulement, du point de vue marketing, porter un nom commun, c'est trop commun. Un nom propre, donc sans article, ça vous place, ça vous valorise, ça fait de vous un être vivant, une personne à part entière.
C'est une peu comme l'acronyme hébreu "Tsahal", désignant l'armée israélienne, et que les journalistes (encore eux) aiment bien utiliser également sans article. Ce n'est pas une armée, c'est "Tsahal". Et, pour aller encore plus dans l'indécence, cela me fait penser aussi à ces beaux noms métaphoriques que l'on donne aux opérations militaires : Tempête du désert, Opération plomb durci... On est en pleine fiction.